L’homosexualité pose-t-elle des problèmes spécifiques dans le développement d’une spiritualité satisfaisante, sinon épanouie ? Ouvre-t-elle des perspectives nouvelles ? Y-a-t’il une spiritualité homosexuelle ? Sincèrement, je ne le crois pas. Mais on peut se poser ces questions ? Certains les posent, nous les posent ou nous les opposent. Envisager une spécificité spirituelle du positionnement homosexuel, suppose de toute façon quelques prérequis. |
Il me semble en effet difficile d’aborder le thème « spiritualité et homosexualité » sans s’expliquer un minimum avec ce qu’on entend par « spiritualité », c’est-à-dire sans esquiver ce que l’usage de ce mot révèle de prise de distance à l’égard de la religion, mais aussi de difficulté à envisager la dimension sociale du phénomène de la croyance. Du point de vue de l’homosexualité, parler de spiritualité et non de religion ne doit pas être une position de repli en face de religions soupçonnées d’exclure l’homosexualité.
Même s’il s’agit sans doute avec l’homosexualité d’une modalité spécifique du positionnement par rapport à la différence des genres, nous ne pouvons pas non plus ignorer qu’il s’agit aussi de sexe et de sexualité. Parler de « spiritualité » ne peut pas être une manière d’esquiver la question des rapports complexes qu’entretient la religion, et donc la spiritualité, avec la sexualité.
La sexualité se situe au carrefour de nos conceptions de la nature (du monde, de l’univers), de l’humanité (l’individu ou l’espèce) et du langage (comme médiateur de notre rapport à nous-mêmes, à la société et à l’univers). Sans doute parce qu’elle reste un phénomène minoritaire sinon marginal, l’homosexualité a longtemps pâti d’être exclusivement décrite de l’extérieur, dans le cadre de conceptions qui, la plupart du temps, l’excluaient de la norme, avec ou sans justification religieuse. Nous ne pouvons enfin éviter de situer l’homosexualité par rapport à la sexualité en particulier et aux ordres dans lesquels elle s’insère : nature, humanité, langage (ontologique, anthropologique, symbolique).
Il me semble qu’une fois franchies ces trois étapes, nous serons mieux en mesure d’envisager s’il existe ou non une spécificité spirituelle du positionnement homosexuel.
Y-a-t’il une dimension spirituelle de l’existence ? Les esprits ? Le spiritisme ? Culture de l’âme distincte (pas forcément opposée) de la culture du corps ?
Comment articuler croyances privées et croyances publiques ? De façon figée ou de façon dynamique ? Le souci de soi et le souci des autres ?
Se comprendre soi-même ? Se construire soi-même ? La qualité des énoncés de croyance qui constituent notre moi et de ceux qui constituent notre société ? Les croyances qui nous plombent et celles qui nous libèrent ? Comment je les hiérarchise ? Celles que je suis disposé à abandonner et celles auxquelles je tiens absolument. Puis-je me forger mes propres croyances ?
Dans notre compréhension de l’ordre naturel, dans notre conception de la nature humaine, dans la structuration de la société, dans la grammaire du langage ? La différence homme/femme est-elle le modèle fondamental de notre rapport à l’altérité ?
ce dont j’hérite, ce que je comprends, ce que j’accepte, ce que je rejette, ce que je construis moi-même, comment je le négocie avec mon entourage et mon environnement ?
Quelle importance lui accordent-elles ? Absolutisation ? Relativisation ? Place de cette différence dans les mythes fondateurs ? Une divinité unique est-elle mâle ou femelle ? Religion et spiritualité figent-elles les positions ou favorisent-elles une négociation ?
ce dont la satisfaction directe mettrait en cause la cohésion ou la survie du collectif ? Le désir comme origine de la guerre de tou(te)s contre tou(te)s.
Ce qui est inter-dit est-il ce qui est susceptible de mobiliser le maximum d’énergie libidinale au profit de la créativité personnelle ou collective ?
canaliser l’énergie libidinale au profit de la société : des enfants et/ou des oeuvres d’art. Produire son/ses propre(s) bien(s), en jouir, les offrir à la jouissance d’autrui, avec ou sans contrepartie.
la caractère sacré de ce qui est interdit. Qu’est-ce qui est sacré dans la sexualité ? Maintenir à distance, respecter des seuils, les franchir.
extase et orgasme . La jouissance de l’autre et la mienne. Le plaisir et tout ce qui relève de l’approche (prochain, proximité, etc…) et qui suppose la culture d’une séparation. Quel rôle pour le langage et la parole ?
par rapport à la sexualité en particulier et aux ordres dans lesquels elle s’insère (nature, humanité, langage) ?
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Quelle marge de manoeuvre pour une acceptation, compréhension, création de soi ?
c’est-à-dire développer un système de croyances privées (personnelles) en bricolant avec les croyances héritées donc publiques
Comment les croyances privées qui nous permettent de faire contribuer notre homosexualité à notre recherche de bonheur peuvent-elles s’articuler aux croyances (morales) qui assurent la paix du vivre ensemble ?